Compagnies low cost : plongée au coeur de leur business model
Dans un contexte général de forte progression du e-commerce, les compagnies "low cost", qui ont mis Internet au cœur de leur modèle, enregistrent des chiffres en très forte augmentation sur 2005, témoignant d'un secteur en pleine croissance. En 2002, les aéroports français enregistraient près de 5,5 millions de passagers voyageant sur des compagnies low cost, soit 5 % du trafic total selon la Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC). En 2005, ce seraient près de 15,1 millions de passagers de ces compagnies qui auraient transité dans les aéroports français, sur un total de 140 millions, soit plus de 10 %. La DGAC estime également que la part des compagnies à "bas coûts" dans le trafic sur les destinations de l'UE est de 24 %, ce qui représente une croissance annuelle de 19 %.
Les compagnies "low cost" s'étant, dès leurs origines, largement appuyées sur le canal de vente en ligne, il n'est pas étonnant que le profil des clients des compagnies "low cost" soit en priorité celui d'internautes avertis, comme le met en lumière la récente étude de TNS Infratest. En effet, le cabinet d'études allemand estime que le succès du modèle "low cost" se confirme tout particulièrement auprès des "Smart shoppers", qui sont de jeunes voyageurs issu d'un milieu socio-culturel et éducatif plus élevé que la moyenne, et qui consacrent beaucoup de temps à la recherche de bonnes affaires sur Internet.
Inspirées du modèle de la compagnie américaine Southwest, les compagnies à bas coûts ont rapidement opté pour du 100 % Internet afin de réduire leurs coûts de distribution. "Avec l'impression de billets et la distribution via des agences de voyage, le circuit traditionnel représentait 15 % des coûts d'une compagnie régulière. Or chez SkyEurope, tout est électronique : le paiement en ligne est immédiat, ce qui nous garantit un surbooking nul et nous permet d'enregistrer directement les commandes dans notre outil comptable", affirme Christian Mandl, directeur général de SkyEurope, une compagnie "low cost" slovaque créée en 2001 et desservant trois aéroports en France (Orly, Mulhouse, Nice), via six destinations en Europe Centrale. Pour cette compagnie, 77 % des réservations au départ de la France sont réalisées en ligne.
Chez Virgin Express, qui depuis avril 2005 est placée avec la compagnie SN Brussels Airlines sous l'actionnariat de SN Brussels Airholding, 80 % des passagers en moyenne effectuent leur réservation via Internet. Un chiffre bien supérieur à celui de SN Brussels Airlines, dont 20 % des passagers auraient réservé en ligne depuis Bruxelles en 2005, selon la compagnie. Pour leur part, EasyJet et Ryanair flirtent tous deux avec les 100 % de réservations en ligne en 2005 : 97 % des vols sont réservés sur le site d'EasyJet, les 3 % restants étant vendus via le call center et aux comptoirs des aéroports ; ce taux atteint 98 % chez Ryanair. "A la différence des autres compagnies aériennes, nos clients viennent sur notre site avec l'intention d'acheter, et ne se limitent pas à la consultation des horaires", estime Peter Sherrard, directeur de la communication de Ryanair.
Toujours dans cette même optique de réduction des coûts, les compagnies low cost ont été pionnières en matière de e-services, la plupart s'étant notamment lancées en "ticketless", c'est-à-dire sans billet papier, comme notamment Virgin Express. "Pour Virgin Express, la réservation est réalisée contre un paiement, et n'a pas de valeur faciale, à la différence du e-ticket correspondant aux normes IATA proposé sur le site SN Brussels Airlines", explique Bruno Drusselmans, responsable e-business. La modification des billets (pour la destination ou pour le vol) impose donc l'annulation de la vente et la création d'une nouvelle réservation, ce qui a conduit la compagnie à offrir immédiatement la possibilité à ses clients de modifier leurs réservations en ligne.
Ce même service est proposé sur EasyJet, qui vient également de lancer un service d'enregistrement en ligne des passagers qui n'ont pas de bagage en plus de leur bagage à main. Autre compagnie low cost à se lancer dans le développement de e-service : Ryanair, qui depuis le 16 mars dernier propose sur son site le "Web check-in" pour les passagers sans bagage et disposant d'un passeport européen. "Trois jours avant le départ, les clients ont la possibilité d'imprimer leur carte d'embarquement à domicile, ce qui leur permet de se présenter directement à la salle d'embarquement 30 minutes avant le départ", détaille le directeur de la communication de Ryanair. Une manière également pour la compagnie de diminuer ses coûts de traitements et de services au sol. De même, les clients voyageant avec un ou plusieurs bagages sont invités à les pré-enregistrer en ligne, au moment de leur réservation. Un bagage de 10 à 20 kg est facturé 3,5 euros en ligne, tandis que sur place, cela coûte 7 euros aux clients. Parallèlement à cet axe de développement sur les e-services, les compagnies low cost travaillent activement à la vente en ligne de prestations annexes. Depuis début avril, Virgin Express a intégré à sa vente de vols la possibilité de choisir une assurance bagage et rapatriement. De manière annexe, la compagnie dispose de partenariats avec Expedia pour la réservation de nuitées d'hôtels et avec Hertz la location de voitures. Mais si aujourd'hui, ces offres restent accessoires pour la compagnie belge, cela n'est pas le cas de tous les low cost. L'offre de SkyEurope est plus étoffée, allant jusqu'à la réservation de transferts et d'accès aux salons des aéroports. "Nous souhaitons offrir à nos clients une solution complète. Notre portail de voyage est une extension de notre métier. Les commissions représentent aussi des sources de revenus conséquents", confie le directeur général de SkyEurope.
Les commissions représentent des revenus conséquentsPour Ryanair, 14 % des revenus en 2005 sont le produit de ces services, qui enregistrent ainsi une croissance annuelle de 40 %. Si le tarif moyen du billet d'avion est de 41 euros, le panier moyen par passager en 2005 était de 48 euros, en raison des réservations de voitures, d'hôtel ou d'assurance voyage, selon la compagnie. "Ces partenariats sont particulièrement importants en raison du prix du kérosène et de la forte concurrence. C'est pourquoi nous avons placé ces services sur notre page d'accueil. Sur notre chiffre d'affaires de 1,341milliards de livres (1,93 milliards d'euros) en 2005, ces services nous ont permis de générer de 87 millions de livres (125 millions d'euros)", indique Oliver Aust, Corporate Affairs Manager Europe chez EasyJet. Au-delà d'une diminution des coûts de traitement en interne, le modèle "low cost" a jeté son dévolu sur le canal Web afin de réduire les coûts des intermédiaires, sur le modèle de Dell. "Nous avons lancé notre site Web marchand en 2000, qui, à notre plus grande surprise, a connu un grand succès en seulement trois mois, enregistrant 50.000 réservations par semaine, confie Peter Sherrard, directeur de la communication de Ryanair. Nous avons donc proposé des tarifs plus attractifs en ligne pour encourager les ventes." Le raisonnement s'avère identique pour EasyJet, qui à l'heure actuelle ne travaille toujours pas avec les agences de voyage ou les tour-opérateurs. "Internet est le canal de ventes le plus rapide et le moins coûteux, et il demeurera à l'avenir notre canal de vente principal", affirme Oliver Aust, Corporate Affairs Manager Europe chez EasyJet.
Toutefois, cette posture ne concerne pas toutes les compagnies. SkyEurope n'est, pour sa part, pas contre une coopération avec les agences de voyages et travaille déjà avec plusieurs d'entre elles. Mais pour pouvoir laisser aux clients le choix de leur canal de commercialisation, la compagnie a opté pour un modèle qui fait supporter le coût du canal aux clients, via un numéro de call center payant et la facturation de frais de dossiers par les agences de voyage. De même, cette question constituera un défi pour Virgin Express et SN Brussels Airlines qui doivent être regroupées sous une seule marque d'ici le printemps prochain. "Pour Virgin Express, le site Internet constitue le canal de vente principal, tandis que pour SN Brussels Airlines, la volonté consiste à laisser le choix du mode de réservation à nos clients", explique Bruno Drusselmans, responsable e-business pour Virgin Express et SN Brussels Airlines. Cependant, bien qu'uniquement en ligne, Virgin Express travaille déjà avec des agences de voyage, leur offrant notamment un site professionnel de réservation.
Le rapprochement de ces deux compagnies constitue finalement un symbole de la tendance observée sur le secteur aérien ces dernières années, les low cost ayant joué un rôle d'aiguillon vis à vis des compagnies traditionnelles, qui ont adopté en partie les modèles qu'elles ont introduits.
Source : le Journal du Net : http://www.journaldunet.com/0604/060418-enquetelowcost.shtml
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